Sur le toit de Bozar flotte le drapeau ukrainien. À l’intérieur, Joyce DiDonato donne aux musiciens de l’ensemble Il Pomo d’Oro ses derniers encouragements. « Ce soir, c’est pour la paix », annonce-t-elle aux artistes qui l’accompagnent. À une heure du concert, la guerre en Ukraine est dans tous les esprits, comme le raconte le chef Maxim Emelyanychev. « Je suis Russe et pour moi, c’est trop difficile d’entendre toutes ces actualités, de supporter ce qui se passe dans le monde. Bien sûr j’espère que la paix arrivera le plus rapidement possible. Ce qu’on peut faire, nous, de notre côté, c’est créer de la musique, créer de l’art, et je suis heureux si la paix règne dans la salle de concert. »
« C’est très émouvant de présenter des spectacles dans le contexte actuel »
Eden réunit un répertoire qui va du XVIIe au XXIe siècle, avec des œuvres inspirées par le thème de la nature. Le spectacle se veut humaniste, et sa démarche revêt une dimension particulière en ce moment, explique Marie Lambert-Lebihan, sa metteuse en scène : « C’est très émouvant de présenter des spectacles dans le contexte actuel et en tant qu’artiste, je ne peux qu’espérer que le message de paix que Joyce apporte soit reçu. Qu’on arrive à créer les conditions dans lesquelles il est accepté par le public. Et une fois que le public est assis, c’est à nous de lui donner quelque chose de très spécial. »
Ce soir-là, les jeunes chanteurs et chanteuses de la chorale Equinox de Bruxelles ont rejoint Joyce DiDonato sur scène. La chanteuse a décidé de faire appel à une chorale locale dans chaque ville de la tournée. Issus de milieux sociaux très différents, ces enfants bénéficient particulièrement de ces initiatives artistiques, raconte Mélanie Pelé, coordinatrice pédagogique des chorales Equinox : « Je crois que ça les sensibilise. On a d’ailleurs une Ukrainienne dans la chorale dont le papa est parti à la guerre, donc on en a parlé. Mais ce qui les sensibilise aussi c’est la différence, parce qu’il y a une grande mixité sociale, donc ce sont des enfants qui n’auraient jamais dû se rencontrer. Ils sont tout le temps dans l’adaptation : accepter la différence, cela fait partie de l’essence d’Equinox. »
« Ce soir le monde n’est pas vraiment beau »
Émue, Joyce DiDonato a tenu à dédier son concert à l’Ukraine et au peuple ukrainien. La nature de son projet a définitivement évolué. « Ce n’est pas la façon dont je l’avais conçu, mais tout a si vite changé. Cela conforte ce que je pense depuis toujours : que le cœur humain, l’humanité, a besoin de musique. Ce projet a vu jour le jour avant le conflit, mais résonne parfaitement avec le contexte. »
Et c’est, pour terminer, en musique que Joyce DiDonato a conclu cette soirée. Avec projetées dans la salle les couleurs jaune et bleu, les mêmes que celles qui flottent sur le drapeau accroché sur le toit de Bozar.